2. Architectures des agents et langages
2.2 Architectures des agents intelligents

2.2.1 Intelligence artificielle et théorie de la décision

Dans la communauté des agents artificiels, le comportement rationnel, notamment l'action vers l'accomplissement des buts, a été le sujet d'étude aussi bien en intelligence artificielle qu'en théorie de la décision. En intelligence artificielle, les chercheurs ont étudié ce comportement rationnel surtout du point de vue des modalités par lesquelles les agents atteignent leurs buts, et ils se sont particulièrement intéressés aux problèmes de planification : quelles sont les actions à effectuer pour arriver à un certain but ? Cette approche est aussi connue comme "raisonnement orienté modalité". En théorie de la décision, le principal point d'intérêt a été un peu différent : lorsqu'un agent connaît les alternatives permettant de réaliser ses buts, comment doit-il les évaluer afin de choisir la meilleure voie à suivre ? Ce choix devrait être fait en fonction des utilités associées par l'agent aux divers états désirables.

Il est certain qu'un agent rationnel doit prendre en compte les deux aspects :

  • les modalités ou actions pour atteindre ses buts et
  • le choix des actions qui peuvent lui apporter la plus grande utilité.

En même temps, il faut tenir compte du fait que, dans une application réelle, l'agent a un temps limité pour réaliser ses buts. Dans un modèle théorique, un agent peut passer autant de temps qu'il sera nécessaire à évaluer diverses actions possibles ; mais en réalité le temps dont l'agent dispose pour choisir la meilleure action est fini. On dit que l'agent est limité du point de vue ressources, où, par ressources, on comprend le temps de calcul et/ou la capacité de la mémoire de l'ordinateur. Par conséquent, un agent artificiel conçu pour une application réelle doit trouver le juste équilibre entre le temps passé à décider entre actions compétitives et le temps mis à effectuer ces actions.

Même si on ignore le problème du choix des actions les plus désirables, si l'agent développe un plan dans un environnement, il est bien possible que les conditions de l'environnement au moment où le plan a été fait soient différentes de celles qui règneront au moment où le plan sera exécuté. Par exemple, l'environnement est non déterministe et comprend plusieurs agents ; chaque agent agit et modifie, d'une façon ou d'une autre, l'environnement. Ce problème est toujours lié aux ressources limitées de l'agent, car l'agent a besoin d'un certain temps pour établir son plan d'action et, pendant ce temps, l'environnement peut changer. Dans ce cas, est-ce que l'agent doit toujours vérifier, avant d'effectuer une action, si les conditions de l'environnement ont changé ? Et si oui, doit-il refaire son plan à chaque fois ? On rencontre alors le même problème : trouver un juste équilibre entre planification et replanification, et faire des suppositions sur l'état de l'environnement.

Il est difficile de trouver une juste réponse à tous ces problèmes. L'architecture BDI qui sera décrite dans la section suivante semble avoir les qualités nécessaires pour être un bon candidat. L'architecture BDI s'est d'ailleurs avérée comme l'une des architectures favorites dans la communauté des agents intelligents et des systèmes multi-agents.

Il faut noter que les aspects que l'on vient de discuter sont spécifiques aux agents cognitifs, notamment aux agents avec états, buts et, le cas échéant, avec utilité. Les agents réactifs n'ont pas à planifier leurs actions ni à choisir parmi des états désirables car, comme il a été dit dans le premier chapitre, leur intelligence émerge de l'interaction de leurs simples actions sur l'environnement. Par contre, quand on discute de l'architecture des agents, on peut parler aussi bien d'architectures d'agents cognitifs que réactifs.

Avant de commencer à présenter des architectures, il faut définir ce qu'on entend par architecture d'un agent. Même s'il n'y a pas consensus sur ce point, on peut dire que l'architecture d'un agent est une description de son organisation interne : les données et les connaissances de l'agent, les opérations qui peuvent être effectuées sur ses composantes et le flux de contrôle des opérations. Le choix d'une architecture ou d'une autre est, bien sûr, lié à la structure conceptuelle de l'agent, décrite dans la section précédente, et représente la décision du concepteur sur la façon de bâtir l'agent artificiel. Les figures de la section précédente, qui décrivent la structure des divers types d'agent, sont des exemples d'architecture d'agents, bien qu'à un niveau de description très général. Nous allons voir dans ce qui suit des exemples d'architectures d'agents plus détaillées, et étudier d'une manière systématique leur fonctionnement.

<< Section précédente Table de matières Section suivante >>

Politechnica University of Bucharest - 2002